vendredi 29 octobre 2010

Les Emirats arabes unis sont en deuil

saqr.jpgJe suis au regret de vous annoncer que Sa Majesté Sheikh Saqr bin Mohammad al Qasimi est décédé il y a deux jours, à l'âge de 90 ans (bien que l'on ait des doutes sur son âge, puisqu'à l'époque de sa naissance, les émiratis étaient encore nomades et avaient autre chose à faire que de noter les dates de naissance).

 

Sheikh Qasr était l'émir de Ras al Khaïmah, l'émirat le plus au Nord des EAU. Il occupait ce poste depuis 1948, 62 ans de règne, et il était le souverain le plus vieux au monde.

 

A l'annonce de sa mort, Ras al Khaïmah a décrété 40 jours de deuil, dont une semaine où les administrations sont fermées. Deuil, cela signifie que tous les évènements festifs sont interdits, que les drapeaux sont en berne, que l'alcool est interdit, que les radios cessent d'émettre leur programme habituel pour diffuser des versets du Coran, et que la musique est interdite dans les lieux publics.

 

Abu Dhabi et Dubaï ont de leur côté décrété 7 jours de deuil, sans jour férié. Des exceptions sont également faites pour la musique dans les bars et les boîtes, ainsi que pour l'alcool, pour des raisons économiques. Mais les radios ont quand même cessé d'émettre, et à la place de ma radio pirate préférée, j'ai des versets du Coran, ce qui donne quand même moins la pêche le matin, reconnaissons-le.

 

Le prince héritier de Ras al Khaïmah, son fils, a pris la succession du regretté Sheikh Saqr, qui pourra enfin se reposer après 62 ans de cotisation pour la caisse des retraites...

dimanche 24 octobre 2010

Petit lexique des expressions courantes aux EAU

Même si tout le monde parle anglais, il y a quelques expressions arabes incontournables qu'il faut connaître.


Salaam ou'aleikoum (transcription approximative)

Ca veut dire "la paix soit sur toi", et les musulmans du monde entier l'utilisent pour se dire bonjour. Dire bonjour est très important dans la culture bédouine, et il faut toujours prendre le temps de dire les politesses d'usage avant d'entamer le vif du sujet.

Ca donne à peu près ça (traduit) :

- Salaam ou'aleikoum !

- Ou'aleikoum salam Habibi (voir ci-dessous) !

- Comment ça va ?

- Ca va, ca va, alhamdoulillah (variante locale de "Imothep")

- La famille ça va ?

- La famille ça va.

- Les affaires ça va ?

- Les affaires ça va.

- Le chameau ça va ?

- Le chameau ça va !

- Le cochon d'inde de ta soeur, ça va ?

- Alhamdoulillah, et toi la famille ça va ?

- ...

Et ça peut durer un bout de temps. C'est d'ailleurs de là que vient l'expression en français "faire des salamalecs", pour "parler beaucoup, tourner autour du pot".

 

***

Inch'allah et Alhamdoulillah :

Ces expressions veulent dire "Si Dieu le veut" et "Grâce à Dieu", et elles s'utilisent véritablement dans toutes les phrases phrases. Elles expriment l'idée que malgré tout ce que l'on peut faire, rien ne se fait sans la volonté d'Allah.

On utilise donc Inch'allah pour tous les évènements futurs et Hamdoulillah pour tout ce qui est passé. Mais attention, Inch'allah dans le monde du travail peut aussi vouloir dire que votre interlocuteur n'a pas grand chose à carrer de ce que vous lui demandez, et exprime du coup une grande incertitude.

 

Exemple ; J'ai trouvé un boulot Al Hamdoulillah, du coup j'aurais ma retraite en 2057 inch'allah.

 

***

Habibi

Ca veut dire "mon chéri" mais les arabes l'utilisent comme surnom entre amis.

 

Sur ces belles paroles, Habibi, j'ai déjà écrit pas mal de bêtises Hamdoulillah, donc je vais vous souhaiter une bonne nuit et je vous dis à bientôt Inch'allah !

mercredi 20 octobre 2010

Jebel Shams II : les explications

Concernant cette fameuse ascension du Jebel Shams, la vidéo ne montre pas tout. Reprenons donc tout du début...
ptit-dej.jpg
Alors que le week-end s'annonçait désoeuvré (ça fait du bien un petit week-end comme ça de temps en temps), la motivation tomba sur nous comme la rosée sur une matinée de printemps. Ni une, ni deux, un jour et demi avant le week-end, nous avons décidé avec Charlie de partir grimper ce Jebel Shams qui nous était resté en travers de la gorge.

Le temps de rassembler toutes les affaires en sortant du boulot le jeudi soir (nous avions fait les courses la veille), et nous voila parti en direction d'Oman, autour de 20h30.
Le temps de manger sur la route (un repas très équilibré composé de pain de campagne, d'un steak 100% pur boeuf, de légumes, et de pommes de terre frites, en d'autres termes un fast food chez Burger King), d'atteindre la frontière, de passer tous les contrôles à la douane, et il est déjà minuit lorsque nous arrivons en Oman. 
 
Nous avons roulé encore une grosse heure, pour finalement quitter la route par une petite piste de sable. Un petit kilomètre nous amène au milieu du désert omanais, un désert de sable entièrement plat, orné de quelques acacias qui se battent pour survivre. Nous passons la nuit à la belle étoile, sous un ciel scintillant et paisible. 
6h30, le soleil déjà haut nous réveille de ses doux rayons qui chauffent déjà sacrément l'atmosphère. Un petit café au réchaud, et nous repartons pour les 3h00 de route qu'il nous reste pour atteindre le départ de la randonnée. 
 
mon-pote-percno.jpgNous mangeons rapidement et partons de 1700 mètres d'altitude pour notre objectif ; le sommet le plus haut du Moyen-Orient à 3000 mètres.
Nous emmenons avec nous des sacs peu légers ; 20 litres d'eau, la nourriture pour 2 repas et un petit dej, un réchaud et les casseroles qui vont avec, la tente, les affaires de camping, des vêtements chauds pour le soir et des affaires de rechange... bref, un certain poids.
La montée au milieu des pierres découpées par le vent et hyper abrasives, avec un temps menaçant et les vautours percnoptères qui tournent autour de nous, s'est révélée être dure... très dure. Malgré une condition physique hors-norme (voila que mes chevilles enflent encore), on en a sacrément bavé.
Après 6h d'ascension, nous atteignons finalement le sommet, quelques instants avant le coucher du soleil. Mauvaise surprise au sommet, il n'y a pas d'endroit pour planter la tente. Rien qu'un pierrier géant, et des cailloux à perte de vue. A bout de forces, nous avons creusé entre les racines d'un arbre pour nous créer un petit endroit où dormir. Nous avons balancé la tente entre les racines et sous les branches, pour un résultat finalement assez satisfaisant.
tente.jpgUn petit feu de camp, un bon repas, et nous dormions à point fermés à 21h30.
 
Au réveil, le spectacle est magnifique et vaut toutes les peines du monde ; 1800 mètres de falaise, et rien d'autre que les oiseaux, les cailloux et nous.
 
Le retour a été beaucoup plus facile ; nous avons pris une autre route, qui traverse une base militaire omanaise. Un Omanais nous a pris à l'arrière de son camion pour une petite dizaine de minutes, ce qui nous a épargné une bonne heure de marche. En tout, 2h30 nous auront suffit à descendre.
 
6 heures de route plus tard, nous rentrons à Abu Dhabi, fatigués, mais terriblement heureux d'avoir atteint le sommet. Cela dit, de là-haut, on voyait un autre sommet au bord d'une falaise qui avait l'air sympa aussi... Pour la prochaine fois ?

dimanche 17 octobre 2010

Jebel Shams II : le film

Le film que vous attendiez tous est enfin sorti, pour votre plus grand bonheur, je n'en doute pas !
Je vous parlerai des details de cette expedition dans le prochain article.

mardi 12 octobre 2010

Jebel Shams II : le retour

 

Depuis l'échec du Jebel Shams I, la vision du sommet omanais me contemplant de son air narquois revenait me hanter dans mes rêves. Nous avions échoué dans notre tentative (peu préparée il est vrai) d'ascension, et ce sommet ne pouvait rester ainsi invaincu. Il fallait faire quelque chose...

 

L'occasion se présentant le week-end dernier, nous avons décidé avec Charlie (mon colloc) de repartir à la charge, sans plus de préparation, mais avec davantage de détermination et surtout le goût amer de la revanche inassouvie dans la bouche.

 

Voici la bande annonce de cette fabuleuse aventure, à paraître très bientôt en VHS et DVD (vous noterez qu'à la fin de la bande-annonce, le suspense reste entier quand à la réussite ou non de cette tentative...).

 

 

 

samedi 9 octobre 2010

... mais rien qu'un petit air.

(Pour comprendre cet article, il vaut mieux lire l'article précédent, sinon on ne comprend rien et après on est énervé....)


Malgré tout, il y a entre la France du XVIIIe et les Emirats arabes unis d'aujourd'hui quelques différences fondamentales, qui font que le pays ne risque que très très peu une révolution. Et heureusement d'ailleurs ! 
  • Tout d'abord, le "Tiers-Etat" n'est pas dans son pays. En ce sens, les Indiens et les Pakistanais ne sont que peu concernés par l'avenir du pays, on pourrait même dire qu'ils s'en tamponnent l'oreille avec une babouche. Ce pays n'est pas le leur et peu de gens sont près à risquer leur liberté ou leur vie pour un pays qui n'est pas le sien. Et ils sont toujours libres de retourner dans leur pays d'origine.

 

  • Ensuite, les conditions de vie aux Emirats arabes unis, aussi peu drôles qu'elles soient, sont meilleures que dans leur pays d'origine ; c'est d'ailleurs pour cette raison précise qu'ils sont venus ici. Avec leur maigre salaire des Emirats, ils peuvent quand même faire vivre leur famille entière en Inde et au Pakistan. Donc ils ne se plaignent pas, car ils savent que cela pourrait être pire.

 

  • Enfin, les Emiratis sont parfaitement conscients des dangers qu'ils encourent, et surveillent de très près le niveau de mécontentement du Tiers-Etat. Lors de la crise financière de Dubaï, certains ouvriers n'ont pas été payés par leur entreprise, et ont manifesté dans les rues. C'étaient les premières manifestations publiques de l'histoire des EAU. Immédiatement, une loi a été passée obligeant les entreprises à payer les salaires des ouvriers un mois à l'avance sur un compte d'une banque gouvernementale, pour garantir que les salaires soient en effet versés.  Les Emiratis veillent également à garder un niveau de chômage très bas, en renvoyant les chômeurs dans leur pays d'origine s'il le faut, de sorte à garder une quantité très faible de population mécontente. 

 

En gros, les Emiratis manient admirablement bien une répression sévère et une certaine "acceptabilité" des conditions de vie des travailleurs.

 

Pour l'instant, aucun signe de mécontentement ou de soulèvement, même le plus léger. Pour l'instant aussi, l'argent coule à flot, et la croissance économique est au rendez-vous. Pour l'instant toujours, les Indiens et Pakistanais trouvent aux Emirats arabes unis des meilleures conditions de vie et des salaires bien plus haut que chez eux. Pour l'instant enfin, les Emiratis ont une police performante en matière de contrôle, de surveillance et de répression. Donc aucune chance de révolution... pour l'instant.

 

Et dans 30 ans, quand des Indiens seront nés aux Emirats et considéreront ce pays comme le leur ? Et dans 50, quand le pétrole commencera enfin à se faire rare (inch'allah) ? Et qui sait ce qui peut se passer jusque là ? Qui sait, peut être que 1789 n'est pas si loin...

mardi 5 octobre 2010

Comme un petit air...

Les inégalités sociales sont très très grandes aux Emirats arabes unis. Et ce n'est rien de le dire. 
Pour mieux se rendre compte de ce que ça représente vraiment, je vais vous détailler les classes sociales aux Emirats.
 
La noblesse
Ce sont les Emiratis, et les ressortissants des pays du GCC.
Ils sont riches, ils détiennent tous les pouvoirs et sont complètement au-dessus des lois. Personne ne peut imaginer un jour gagner un procès contre un Emirati par exemple.
 
Ce pouvoir, ils ne le doivent qu'à leur naissance ; ils sont nés Emiratis, le resteront toute leur vie, et ils sont donc assurés de ne jamais manquer de rien toute leur vie durant. Ce sont les autres classes sociales qui travaillent pour eux, et le gouvernement qui leur fournit tout ce dont ils ont besoin.
Enfin, ils méprisent complètement les Indiens et les Pakistanais, qu'ils considèrent comme leurs serviteurs.
Ils représentent environ 10% de la population des Emirats.
 
Le "clergé"
Le clergé représente environ 10 % de la population également. Il s'agit des expatriés occidentaux.


Ils sont riches, pas autant que la noblesse, mais suffisamment pour mener une vie confortable vivre dans un certain luxe. Ils n'ont pas le pouvoir, car ils ne sont pas nés Emiratis, mais ils détiennent une autorité non négligeable ; ils ont un savoir-faire que la noblesse n'a pas.
Grâce à ce savoir-faire technique, ils sont très liés à la noblesse, de laquelle ils tirent leurs revenus. Le clergé et la noblesse sont très dépendants les uns des autres ; les premiers ont le pouvoir et l'argent, les seconds ont le savoir-faire et font tourner le pays.
 
On peut presque distinguer le haut-clergé du bas-clergé. Alors que le haut-clergé fricote plutôt avec la noblesse, le bas-clergé travaille avec les Indiens et les Pakistanais. Sans toutefois partager leur condition (ils font toujours partie du clergé quand même), ils sont sûrement plus sensibles à leur cause, et montrent d'avantage de respect pour eux.
 
En photo, le clergé se déguise en noblesse.

Le Tiers-Etat
Eux représentent 80 % de la population. Peu payés, peu ou pas du tout considérés par la noblesse et le clergé, vivant dans des conditions souvent proches du déplorable, ils sont la masse énorme qui fait véritablement tourner le pays. Ils sont les serviteurs de la noblesse. 
 
Le Tiers Etat, ce sont les ouvriers indiens, les chauffeurs pakistanais, les "maid" (bonnes) indonésiennes, les prostituées philippines, les restaurateurs bangladeshis, bref, l'immense masse des petites mains qui sont indispensables au bon fonctionnement du pays, et qui assure les métiers que les Emiratis ne feraient pour rien au monde.
 
 
Mais dites-moi, ça ne vous rappelle rien ? Si ? (Si la réponse est non, je vous conseille sérieusement de relire l'Histoire de France pour les Nuls, entre la page 1700 et 1789). 
Malgré tout, il y a entre la France du XVIIIe et les Emirats arabes unis d'aujourd'hui quelques différences fondamentales, qui font que le pays ne risque que très peu une révolution. Lesquelles ? Vous le saurez en lisant le prochain article à paraître sur ce blog, dans quelques jours (comme ça, si d'ici là il y a une révolution, ça me laisse le temps de changer mon analyse).
 
Retrouvez cet article (en fouillant un peu) sur le site Tout sur les Emirats arabes unis.

dimanche 3 octobre 2010

Prochain article

Je sais que vous attendez tous avec impatience les articles de ce blog. Que sans eux, vous vous sentez petits et insignifiants, et que lire les articles magnifiques de ce blog est devenu votre raison de vivre. Je comprends...

Du coup, pour vous aider à mieux vivre l'attente insupportable du prochain article, j'ai mis une petite rubrique sur la droite qui vous indique pour quel jour est prévu le prochain article. Cette date est assortie du traditionnel "inch'allah", dont je détaillerai l'usage et l'utilité dans un de mes prochains billets !